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Regard politique : entre Regards & Politique
22 avril 2008

Aimé Césaire par Léopold Sédar Senghor

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Aimé CESAIRE

Né le 25 juin 1913 à Basse-Pointe
Mort le 17 avril 2008 à Fort-de-France

[Texte de Léopold Sédar Senghor dans Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française /Puf/1948]

"Lorsque Jules Monnerot, Etienne Lero et René Menil lancèrent le manifeste de « Légitime Défense » à la bourgeoisie antillaise, Aimé Césaire, alors élève de « Khâgne » au lycée Louis-le Grand, fut le premier à l’écouter et à l’entendre. Comprenant qu’il fallait approndir ce message, il remonta, d’une part, aux sources françaises, jusqu’à Rimbaud et à Lautréamont ; d’autre part, à ses propres sources, à ses « ancêtres Bambara », à la poésie négro-africaine.
Nul plus que Césaire, ne mérite le titre de « grand poète noir » que lui décerna André Breton en 1943 . Et d’abord cet ancien normalien, ce professeur de lettres, est le maître magnifique de sa langue, jusque dans le bouillonnement de son délire. Mais le don essentiel de notre poète est la passion. C’est des profondeurs de sa négritude qu’explose le volcan émotionnel. Je dis passion. Le Cahier d’un retour au pays natal — j’ai assisté à sa douloureuse parturition — est l’expression transcendante du drame mêlé de la souffrance morale et de la souffrance physique. Pour finir, le troisième « cœur » du balisier : une tyrannique exigence morale, l’absolu dans le refus de transiger avec le mensonge ou l’injustice.
Ces dons que voilà font le poète noir. Ses images jaillissent des entrailles mêmes du volcan, du creuset où ont mûri métaux et pierres rares, images des trois continents et des trois races, images du monde. Images qui frappent parce que images qui chantent. Car Césaire, qui est surréaliste, mais nègre, ne néglige pas le « stupéfiant chant », — jeu des sonorités et rythmes verbaux — pour le seul « stupéfiant image ».
Le poète va plus loin : il réconcilie le rêve et l’action. Je veux dire que, chez lui, le rêve est action grâce aux « armes miraculeuses » sorties du dépôt ancien de sa négritude. Il réconcilie le poète et le politique, ce « Rebelle » dont chaque chant est un refus hautain au monde blanc de l’argent.
Comprenons Césaire, le « Blanc » symbolise le Capital ; comme le « Nègre » le travail. A travers les hommes à peau noire de sa race, c’est la lutte du prolétariat mondial qu’il chante contre la dictature des pions et des banquiers. Poésie personnelle s’il en fut jamais, poésie raciale, mais gonflée d’un « amour tyrannique » pour tous les hommes de ses frères, « d'un amour catholique », comme il avait tout d’abord écrit."

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